DIALOGUE

Dialogue social

extraits de la documentation française

Si l’expression est fréquemment employée, elle n’a pas de définition univoque.

L’Organisation internationale du travail (OIT), pour sa part, la définit ainsi :

Le dialogue social inclut tous types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs selon des modalités diverses, sur des questions relatives à la politique économique et sociale présentant un intérêt commun. Il peut prendre la forme d’un processus tripartite auquel le gouvernement participe officiellement ou de relations bipartites entre les travailleurs et les chefs d’entreprise (ou les syndicats et les organisations d’employeurs), où le gouvernement peut éventuellement intervenir indirectement.

Les processus de dialogue social peuvent être informels ou institutionnalisés ou associer – ce qui est souvent le cas – ces deux caractéristiques. Il peut se dérouler au niveau national, régional ou au niveau de l’entreprise. Il peut être interprofessionnel, sectoriel ou les deux à la fois. L’objectif principal du dialogue social en tant que tel est d’encourager la formation d’un consensus entre les principaux acteurs du monde du travail ainsi que leur participation démocratique.

Les structures et les processus d’un dialogue social fécond sont susceptibles de résoudre des questions économiques et sociales importantes, de promouvoir la bonne gouvernance, de favoriser la paix et la stabilité sociale et de stimuler l’économie.

 

Les institutions de base du dialogue social

Délégués du personnel

Les entreprises de 11 salariés au moins, ainsi que certains organismes publics, organisent au moins tous les quatre ans des élections de délégués du personnel. Ceux-ci ont pour tâche de représenter les salariés pour présenter toute réclamation d’ordre individuel ou collectif relative aux salaires, aux conditions d’hygiène et de sécurité, de veiller à l’application du Code du travail et des conventions ou accords collectifs concernant l’entreprise. Ils peuvent saisir l’inspection du travail et doivent obligatoirement être consultés sur certaines questions, notamment en cas de prévision de licenciements collectifs dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Comités d’entreprise (CE)

Réunion de comité d'entreprise

Existant dans les entreprises industrielles et commerciales employant plus de 50 salariés et dans certains établissements publics, ils ont un rôle étendu, puisque non seulement ils ont le droit d’être informés sur la gestion économique de l’entreprise, mais ils doivent être consultés sur tout ce qui concerne la marche générale de l’entreprise, l’emploi, les conditions de travail, le temps de travail, la formation professionnelle, l’hygiène et la sécurité… Lorsque l’institution a été créée à la Libération, la volonté du législateur était, en donnant un droit de regard aux représentants des salariés, de prévenir les conflits sociaux. Dans les faits, dans la plupart des cas, les comités d’entreprise consacrent l’essentiel de leur activité à la gestion de leurs activités sociales.

Comme l’explique Paul Santelmann dans « La formation professionnelle continue » (La Documentation française, 2006), « L’expérience des comités d’entreprise (CE), où siégeaient les syndicats, ne permettra pas aux salariés de s’immiscer dans la problématique de la gestion économique de l’entreprise. Ce dernier volet sera souvent escamoté au profit de la “gestion des œuvres sociales”, tant par la volonté patronale que par les orientations de la CGT, notamment à partir de 1948. Pourtant, une enquête sur l’expérience des CE publiée dans les trois premiers numéros de la revue Droit social de l’année 1952 faisait état de “l’intérêt des comités pour les problèmes d’ordre technique”. Intérêt suscité par le caractère “pratique” et “concret” des questions soulevées, que ce soit dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité ou dans celui des innovations techniques permettant l’amélioration des conditions et de l’organisation du travail. Mais, pour la CGT, la modernisation signifie essentiellement l’aggravation des conditions générales de travail des ouvriers. En revanche, pour les autres syndicats, l’évolution technique créait les bases d’une amélioration du sort des salariés tant sur le plan de la production que sur le plan de la vie quotidienne et créait même les conditions pour libérer progressivement l’homme de la machine. Minoritaires, ils n’eurent guère d’espace pour traduire concrètement cette approche ».

Source : Paul Santelmann, « La formation professionnelle continue », Les Études de la Documentation française, 2006.

Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT)

Créés par la loi « Auroux » du 23 décembre 1982 , ils sont les héritiers de l’ancien comité d’hygiène et de sécurité, créé par un décret du 1er août 1947 comme section du comité d’entreprise et de la commission pour l’amélioration des conditions de travail du CE. Leurs attributions se sont progressivement élargies, incluant l’ensemble des problèmes de conditions de travail, y compris les questions de harcèlement.

« Constitué dans tous les établissements occupant au moins 50 salariés, le CHSCT a pour mission de contribuer à la protection de la santé et de la sécurité des salariés ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail. Composé notamment d’une délégation du personnel, le CHSCT dispose d’un certain nombre de moyens pour mener à bien sa mission (information, recours à un expert…) et les représentants du personnel d’un crédit d’heures et d’une protection contre le licenciement. Ces moyens sont renforcés dans les entreprises à haut risque industriel. En l’absence de CHSCT, ce sont les délégués du personnel qui exercent les attributions normalement dévolues au comité. »

Ces institutions sont communes aux secteurs public et privé. 63,2 % des salariés ont voté aux dernières élections de CE (2005, chiffres DARES).

  •  Pour en savoir plus : « Travail et santé » Problèmes politiques et sociaux n° 883, décembre 2002.

Section syndicale d’entreprise

Reconnue après les événements de mai 1968, elle donne aux organisations syndicales le droit de désigner des délégués qui les représentent. Ceux-ci ont des attributions plus vastes que celles des délégués du personnel, puisqu’ils peuvent être amenés à présenter des revendications qui vont plus loin que la seule application de la réglementation du travail. La section syndicale est un élément essentiel de la négociation collective d’entreprise.

Organismes propres à l’administration

Les commissions administratives paritaires (pour les fonctionnaires titulaires) et les commissions consultatives paritaires (pour les non-titulaires) participent à la gestion individuelle des carrières.

Les comités techniques paritaires sont constitués par ministère. Des CTP spéciaux (dans la fonction publique hospitalière, comités d’établissement) peuvent également être créés. Ils sont obligatoirement consultés sur les questions et projets de textes concernant notamment l’organisation et le fonctionnement des services, les conditions de travail, les règles statutaires, les orientations et moyens du service…

Il existe, au niveau national, un conseil supérieur pour chacune des trois fonctions publiques, d’État, territoriale et hospitalière.

A l’inverse de ce qui existe pour les conventions collectives du secteur privé, la signature d’éventuels accords ne lie pas juridiquement l’État.

Pour trouver des données chiffrées sur le résultat des élections : consulter le rapport sur l’état de la fonction publique, présenté annuellement au Conseil supérieur de la fonction publique de l’État.

 

Dialogue social : de la loi à la mise en pratiques

Article Publié le 09/09/2016 – site CFDT, par Aurélie Seigne.

Promulguée en 2015, la loi Rebsamen sur le dialogue social peine à entrer dans la phase opérationnelle sur le terrain. Face à l’attentisme des directions, la CFDT prend les choses en main.

Un an après sa promulgation, où en est l’application de la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, dite loi Rebsamen ? En Conseil des ministres du 22 août, les ministres Marisol Touraine (Affaires sociales et Santé) et Myriam El Khomri (Travail, Emploi, Formation professionnelle et Dialogue social) ont indiqué que « plus de 90 % des décrets ont été pris ». Mais, sur le terrain, « ce n’est pas vraiment opérationnel », note Philippe Portier, secrétaire général de la CFDT-Métallurgie.

« La sortie tardive des décrets a retardé l’application concrète de la loi dans les entreprises, analyse la secrétaire nationale Marylise Léon. Et dans le contexte du débat sur la loi El Khomri, beaucoup de directions ont attendu de s’assurer que les dispositifs étaient bien stabilisés. »

Des changements au temps long

De l’avis général, « 2017 sera la véritable année de mise en œuvre de la loi ». Et ça ne se fera pas en un jour ! « Il a fallu trente ans pour s’emparer de tous les outils de la loi Auroux », rappelle Marylise Léon. « La nouvelle organisation des consultations bouleverse un paysage assis depuis une trentaine d’années », confirme Olivier Laviolette, du cabinet Syndex. Le passage de 17 consultations éparses à trois blocs thématiques articulés en trois temps – sur les orientations stratégiques de l’entreprise et leurs conséquences, puis la situation économique et financière et enfin la politique sociale – « va prendre du temps ». Selon l’expert, le regroupement des négociations autour de deux grands axes (rémunération, temps de travail et partage de la valeur ajoutée ; qualité de vie au travail et égalité professionnelle) dans les entreprises dès 11 salariés, auxquels s’ajoute, dans celles de 300 et plus, une négociation triennale obligatoire sur la gestion prévisionnelle des emplois et des parcours professionnels se fera quant à lui « au fil de l’eau » : « C’est à l’occasion de la renégociation d’un accord antérieur que la plupart des entreprises mettront le doigt dans la nouvelle mécanique. » Sans compter que la réussite de la nouvelle donne de la modernisation du dialogue social passe par une articulation étroite des consultations et des négociations, « les premières devant alimenter les secondes, en termes d’analyses et de positionnement ». Pour Olivier Laviolette, « c’est le principal enjeu de la loi », qui nécessite de renforcer le lien entre les instances représentatives du personnel (IRP) et les représentants syndicaux.

Des réalités très variables

Quant aux IRP elles-mêmes, rares sont les grandes entreprises qui ont aujourd’hui abouti à un accord de regroupement des instances. Chez Syndex, on dénombre « à peine une demi-douzaine de négociations abouties sur le sujet ». L’accord chez Solvay a fait grand bruit ; celui négocié par la CFDT à La Mondiale a été moins médiatisé. Dans les entreprises de 50 à 300 salariés, en revanche, « le mouvement est plus rapide ». Avec des situations très variables selon les secteurs. Si Syndex constate une forte appétence dans les services, notamment financiers, pour la DUP (délégation unique du personnel) « nouvelle formule », c’est-à-dire fusionnant la délégation du personnel, le comité d’entreprise et le CHSCT, « les entreprises du secteur industriel voient un intérêt à conserver un CHSCT en propre ».

La mise en place de nouvelles pratiques dans la durée

Au global, la mise en œuvre des dispositions de la loi dépend beaucoup de la situation du dialogue social dans l’entreprise et des perspectives économiques : « On se préoccupe beaucoup moins des conditions du dialogue social dans une entreprise en restructuration », rappelle Olivier Laviolette. Dans le meilleur des cas, estime l’expert, « il faudra quatre ou cinq ans avant la mise en routine de pratiques structurées autour de la nouvelle donne. Ces prochaines années, l’enjeu sera donc de former, d’accompagner et de soutenir les élus et mandatés ».

Telle est bien la priorité de la CFDT, qui a élaboré de nombreux outils. On peut ainsi citer le guide mis en ligne par la Fédération Métallurgie ou le Mode d’emploi confédéral « Modernisation du dialogue social ». La Fédération des Services réfléchit à un outil numérique aidant les militants à constituer des listes conformes aux nouvelles règles de la mixité proportionnelle, « leur principal sujet de préoccupation actuellement ». La Confédération lancera, le 17 octobre, un outil en ligne d’accompagnement à la nouvelle donne. « On ne peut pas donner la caisse à outils sans mode d’emploi », justifie la secrétaire nationale Marylise Léon.

Un accompagnement individuel des sections

C’est partant de cette certitude que fédérations et unions régionales interprofessionnelles ont multiplié les rencontres avec des collectifs d’entreprise et les formations. Avec une appétence forte des équipes. « Les unions Mines-Métaux ont été obligées de rajouter des sessions », constate Philippe Portier. Même engouement en Pays de la Loire. L’union régionale a organisé, au printemps, une réunion des responsables pro et interpro sur le contenu de la loi, les nouvelles règles et les pratiques syndicales induites. Puis réuni les équipes syndicales département par département, en leur présentant un dispositif d’accompagnement individuel. « On propose aux sections de faire un autodiagnostic en quatre points, explique la secrétaire régionale Anne-Flore Marot : quelle est la qualité du dialogue social dans l’entreprise ; comment fonctionne la section ; quelles sont les relations qu’elle entretient avec les salariés ; quelle est la qualité de ses relations avec les structures CFDT ? Partant de là, on les appuie pour améliorer la qualité du dialogue social en agissant sur les trois leviers qu’elles ont en main. Ça peut passer par une enquête Flash afin de renforcer le lien aux salariés, une formation pour structurer le collectif syndical, travailler sur les liens au syndicat, etc. L’idée, c’est de tirer toutes les opportunités permises par la loi pour améliorer le dialogue social. »

L’envie d’anticiper et d’être force de proposition

La démarche rencontre un franc succès : plus de cent sections ont demandé à être ainsi accompagnées. « Si autant de sections viennent, c’est qu’elles ont envie d’anticiper, analyse Anne-Flore Marot, de maîtriser les enjeux et d’être force de proposition. » Si la loi mettra du temps à produire tous ses effets, une chose est sûre : la CFDT sera à la manœuvre.

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